Mc 7,6-13 JÉSUS RÉPOND AUX PHARISIENS

Publié le par GITANS EN EGLISE

  Mc 7,6-13  JÉSUS RÉPOND AUX PHARISIENS

( voir aussi Matthieu 15,1-20)

 

                La question des pharisiens était posée à Jésus à la fin du texte précédent : « Pourquoi tes disciples ne suivent-ils pas la tradition des anciens ? Ils prennent leurs repas sans s’être lavé les mains. » (v.5).

Jésus va leur répondre avec beaucoup d’énergie et de vérité en mettant en cause la manière dont ils interprètent les règles de la vie spirituelle et religieuse. Il va opposer la religion pharisienne avec la religion évangélique qu’il est venu instaurer.

v. 6 : « Jésus répond aux pharisiens : “Isaïe a fait une bonne prophétie sur vous, hypocrites, dans ce passage de l’Écriture : Ce peuple m’honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi. »

v. 7 : « Il est inutile le culte qu’ils me rendent ; les doctrines qu’ils enseignent ne sont que des préceptes humains. »

v. 8 : « Vous laissez de côté le commandement de Dieu pour vous attacher à la traditions des hommes. »

                « L’hypocrisie que critique Jésus n’est pas nécessairement, n’est même pas au départ, une “comédie” que l’on joue consciemment ; elle est avant tout une contradiction entre la manière dont on se conduit devant les hommes et l’attitude intérieure d’une personne, telle que Dieu peut la juger » (R.Schnackenburg).

Jésus s’en prend d’abord à une situation objectivement fausse. Tout en se disant assoiffés de mener une vie en accord avec la pensée de Dieu (telle est la justice, en définitive : être juste = s’ajuster à Dieu, être comme il veut que nous soyons !), les pharisiens mènent et tentent de faire mener aux autres une vie qui, de fait, ne respecte pas la volonté de Dieu. C’est une telle discordance que Jésus décrit en citant Isaïe (29,13). Le début de cette citation oppose les lèvres au cœur. Jésus préférait au légalisme, si préoccupé d’observances extérieures, le régime religieux où ce sont les dispositions du cœur : amour, oubli de soi, humilité, pardon, - qui comptent d’abord et avant tout. Telle devait être la nouvelle alliance où Dieu déposerait ses directives au fond des siens, les inscrirait dans leur être (Jérémie 31,31-33).

Jésus dénonce ce formalisme (6-8). Il y voit la permanence d’un certain état d’esprit déjà condamné par les prophètes. Le plus grave, dit-il, c’est qu’à force de donner toute son attention à ces menues et innombrables pratiques, on perd de vue l’essentiel, qui est le commandement de Dieu : « Vous laissez de côté le commandement de Dieu pour vous attacher à la tradition des hommes ! » (v.8).

Isaïe (29,13) oppose également au culte (qui est louange des œuvres et des qualités de Dieu), un ensemble de lois faites par les hommes. La pensée des hommes se substitue à celle de Dieu, et cela tout en continuant le culte ! Jésus invitait ainsi les Juifs, non à supprimer le culte, mais à faire naître de leur connaissance de Dieu (qui inclut l’amour de Dieu) leur culte et leur enseignement.

v. 9 : « Jésus disait encore aux Pharisiens : “Vous rejetez bel et bien le commandement de Dieu pour observer votre tradition. »

v. 10 : « En effet, Moïse a dit : Honore ton père et ta mère. Et encore : Celui qui maudit son père ou sa mère, sera mis à mort. »

v. 11 : « Et vous vous dites : “Supposons qu’un homme déclare à son père ou à sa mère : Les ressources qui m’auraient permis de t’aider sont corbane, c’est-à-dire offrande sacrée” ».

v. 12 : « Vous l’autorisez à ne plus rien faire pour son père ou sa mère, »

v. 13 : « et vous annulez la Parole de Dieu par la tradition que vous transmettez. Et vous faites beaucoup de choses du même genre. »

Déclarer ses biens « corbane », c’était faire vœu de les verser un jour au Trésor du Temple. Réservés pour des fins sacrées, ces biens ne pouvaient plus servir à autre chose.

Le cas est particulièrement odieux, hypocrite : l’amour de ses parents est un sentiment naturel profond ; Dieu en fait un devoir dans le décalogue (Exode 20,12). Jésus rappellera le primat de l’amour de Dieu et du prochain (Mt 22,36-40), amour qui « vaut mieux que tous les holocaustes et sacrifices », comme un scribe le reconnut un jour (Mc 12,33). D’ailleurs, « Celui qui n’aime pas son frère qu’il voit, ne peut pas aimer Dieu qu’il ne voit pas » (1 Jn 4,20). Aussi l’on doit se réconcilier avec son frère avant d’aller présenter à Dieu un sacrifice qui traduise un authentique amour de Dieu (Mt 5,23-24 ; 1 Jn 4,20). Le primat de l’amour serait annulé par un homme qui dirait “corbane” ! Voilà un moyen odieux, hypocrite de s’affranchir d’un devoir sacré ! Un prétexte facile pour ne pas avoir à s’occuper de ses parents…

La réponse de Jésus aux pharisiens est une attaque en règle sur leur comportement hypocrite : ils peuvent toujours critiquer les autres ; qu’ils commencent par se regarder eux-mêmes ! La religion pharisienne était fondée sur des observances et des préceptes humains, qui n’ont pas cessé d’augmenter et de se multiplier jusqu’à prendre la place de l’essentiel. Religion tatillonne, sclérosée, étouffante, où prolifèrent des règles minutieuses, qui finissent par étouffer l’esprit, et que l’on observe finalement de façon matérielle et routinière. Leur pratique fait partie des habitudes de la vie courante, ce qui dispense de s’interroger sur les dispositions du cœur. On se sécurise à bon compte. On se fait illusion sur soi-même. On se remet de moins en moins en question, tout en méprisant les autres. On finit, comme le dit Jésus, à en arriver à tourner le dos aux commandements de Dieu.

Jésus attaque avec courage ces hommes endurcis pour tâcher de leur ouvrir les yeux et le cœur… « Et vous faites beaucoup de choses du même genre » (v.13).

À cette religion pharisienne Jésus oppose la religion évangélique, fondée sur le cœur, sur les dispositions intérieures. Le bien et le mal ne se situent pas dans ce qui est extérieur à l’homme. Le bien et le mal se mesurent aux exigences de la conscience morale, qui sont exprimées généralement par les commandements de Dieu. Ils ne se mesurent pas évidemment, par la pratique aveugle de la tradition des hommes…

Ces deux religions (pharisienne et évangélique) sont radicalement opposées l’une à l’autre. Jésus nous en a bien avertis : « Écoutez-moi tous, et comprenez bien » (Mc 7,14). La religion des pharisiens est la religion du dehors, des lèvres et hypocrite, religion de la seule pratique qui, sans la foi, n’est que gestes vides. La religion du Royaume est la religion du dedans, du cœur, et véritable religion de la foi qui anime la pratique et passe dans toute la vie.

Jésus a grossi les traits de ces deux religions qui sont de tous les temps parmi les hommes. Il faut donc bien comprendre sa pensée et ne pas la simplifier trop vite : la pratique religieuse ne vaut que par la foi qui doit l’animer. La foi chrétienne n’est vraie que si elle passe dans la pratique, et cette pratique n’est pas seulement culturelle. Toutefois le problème sera souvent de savoir si la pratique culturelle exprime authentiquement la foi des chrétiens de notre temps…

Publié dans MARC

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