Mt 4,1-4 JÉSUS EST TENTÉ AU DÉSERT (1)

Publié le par GITANS EN EGLISE

Mt 4,1-4 : JÉSUS EST TENTÉ AU DÉSERT (1)

Jésus a reçu l’Esprit, et désormais l’Esprit le pousse. C’est au désert qu’il est d’abord conduit.

Jésus va revivre au désert les tentations de son peuple durant l’Exode :

Jésus, nouvel Israël, nouveau Moïse, résiste aux trois tentations :

«  Retire-toi, Satan ! » (Mt 4,10).

Matthieu a comme mis en scène, au début de la vie publique de Jésus,

des tentations qu’il a en fait éprouvées pendant toute sa vie :

 constamment Jésus a dû se défendre

d’utiliser sa divinité pour s’épargner des soucis humains (Mt 12,24-30 ; 16,23 ; 26,59 ;27,40).

 

Matthieu

Deutéronome

Exode

tentations

v. 3-4

Première TENTATION

8,3

16,14

Messianisme terrestre

v. 5-7

Deuxième TENTATION

6,16

17,1-7

Messianisme magique

V. 8-11

Troisième TENTATION

6,13

23,20-30 ; 34,11-14

Messianisme politique

 

            Le diable, en effet, place Jésus dans les grandes tentations auxquelles le peuple a succombé autrefois, d’après le Livre de l’Exode.

            Mais Jésus les repousse comme le peuple aurait dû le faire, d’après le Deutéronome.

            L’itinéraire du peuple qui avait raté autrefois, réussit maintenant en Jésus. Il se détermine librement devant le triple choix qui lui est présenté : refus d’une domination terrestre sur le monde, sa mission étant d’annoncer aux pauvres la Bonne Nouvelle du salut.

            Par les références au Deutéronome, Matthieu montre en Jésus le nouveau Moïse.

 

            Après une visite à Nazareth, Jésus se fixe à Capharnaüm, dans la “Galilée des Nations”. On sent poindre ici l’universalisme de Matthieu.

 

                4,1 : « Alors Jésus fut conduit au désert par l’Esprit pour être tenté par le démon ». “Alors”, c’est-à-dire aussitôt après son Baptême au Jourdain. “Conduit par l’Esprit” : Celui qui est descendu sur Jésus après son Baptême. C’est ici la quatrième fois qu’il est question de Lui (1,20 : 3,11 ; 3,16 ; 4,1). Trois évangélistes (Mt-Mc-Lc) le confirment : Jésus ne s’est pas exposé au tentateur de lui-même, il y a été “conduit” par l’Esprit de Dieu. La tentation est une “épreuve” ; y résister, rend plus fort et manifeste le sérieux de notre amour.

« Au désert » : ¨Pour les lecteurs Juifs de Matthieu, le “désert” évoque immédiatement le séjour de quarante ans du peuple après sa sortie d’Egypte, raconté dans la Bible au Livre de l’Exode. Au désert, le peuple a eu faim et soif. Il a succombé aux tentations : il a regretté l’Égypte (Exode Ch 16) ; il s’en est pris à Dieu, doutant qu’il soit au milieu de lui et demandant des preuves de sa présence ( Exode Ch 17) ; il a adoré le Veau d’Or (Exode Ch 32), au lieu de reconnaître le Dieu vivant qui libère de l’oppression. [Se mettre dans des situations sans issue et en accuser Dieu, ou adorer d’autres dieux, sont des façons de mettre Dieu à l’épreuve, de le “tenter” ; la Bible condamne ces attitudes qui ruinent l’Alliance conclue entre Dieu et le peuple]. Jésus quitte le Jourdain où il a été baptisé, pour les régions montagneuses et désertiques de Juda, entre Jéricho et Jérusalem.

Mais le désert est aussi ce lieu où Dieu visite son peuple. C’est là qu’il va lui donner la Loi qui permet de vivre en société et qu’il va conclure avec lui l’Alliance (Exode 24), signe de sa bonté et de sa sollicitude.

« Pour être tenté par le démon ». Quand on parle du démon, ou du diable, ou de Satan, ou du tentateur, ou du mauvais, on évoque cette force maléfique invisible, « l’ange du mal », bien présent dans la Bible, mais aussi dans le monde et dans nos propres vies ; en grec, on l’appelle « le diviseur », et en hébreu « l’adversaire ». C’est lui qui détourne ou sépare de Dieu ; il est l’adversaire sur le chemin de l’homme. Dans la Bible, la tentation est présente dès le début du livre de la Genèse, lorsque le serpent tente Ève. Sous forme d’une figure personnifiée, on le rencontre dans le livre de Job. Avec le Nouveau Testament, la présence de l’adversaire, du tentateur, se renforce et le combat est nettement plus marqué. Jésus le rencontre dans le désert sous la forme d’une figure personnifiée. Assumant toute l’histoire de son peuple, Jésus la mène à son accomplissement, en revivant pour son compte les grandes épreuves de l’Exode. Mais alors que le peuple Hébreu avait succombé aux tentations, Jésus en sort vainqueur, incarnant en sa propre personne un Israël authentique et fidèle à son Dieu. Voilà la vraie raison de cette triple tentation.

            4,2 : « Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, Jésus eut faim ». Le nombre “40” est chargé de sens en milieu Juif. Le peuple est resté 40 ans à errer dans le désert, exposé et soumis aux tentations. Ce temps, celui d’un changement de génération, indique une longue période. Les « quarante jours » auxquels Matthieu ajoute les « quarante nuits » indiquent l’ampleur, la durée, de la tentation pour Jésus, l’intensité de l’expérience spirituelle, et montrent que la victoire de Jésus est complète. Il dira plus tard : « Ayez confiance, j’ai vaincu le monde (c’est-à-dire, le Mal, le Tentateur) » (Jean 16,33).

            4,3-4 : Le tentateur s’approcha et dit à Jésus : « Si tu es le Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains ». Tout de suite le diable en appelle aux besoins du corps : tout être humain a besoin de manger. Le diable suppose que Jésus a faim. Il lui suggère d’utiliser son propre pouvoir divin, indépendamment de son Père, pour satisfaire ses propres besoins ; tentation subtile d’exprimer un manque de confiance à son Père qui venait d’affirmer, lors du baptême, qu’il était son Fils bien-aimé. Mais Jésus ne suit pas la suggestion du diable. Il affirme ainsi qu’il n’y a pas que le corps à nourrir. Il y a une autre dimension de l’être humain à honorer, qui est l’esprit, ou le cœur, pour lequel il convient d’offrir une nourriture spirituelle. La Parole qui sort de la bouche de Dieu est vivifiante pour l’homme. Si le pain est pour le corps, la Parole est pour le cœur. Jésus déclare ainsi sa parfaite soumission à la volonté de son Père.

            Au désert, lorsque le peuple était affamé, Dieu lui a donné la “manne”, « ce pain venu du ciel ». C’est une citation évoquant la manne, précisément, que Jésus invoque devant le diable. Ne croyons pas, cependant que, par cette réponse « Ce n’est pas seulement de pain… », Jésus sois favorable à un ascétisme sans prudence. Il jeûnait bien avant que le diable n’arrive et il savait sans doute quand il voulait s’arrêter. Jésus ne cherche pas à mettre gratuitement sa vie en danger.

                D’autre part, le diable appelle Jésus à quitter son état « naturel » d’être humain : pour transformer les pierres en pain, il faut recourir à la “magie” ou à des pouvoirs “surnaturels”. Cet aspect sera repris dans ta tentation suivante, où il sera proposé à Jésus de sauter dans le vide, c’est-à-dire de quitter les lois de la pesanteur. Par deux fois Jésus refusera  l’extraordinaire, le surnaturel. Il montre ainsi qu’il veut rester “homme”. Il n’y a chez lui aucun refus de la condition humaine. Il ne veut pas jouer au « surhomme ». Poussé à agir comme Dieu, il répond comme un homme : « Ce n’est pas seulement de pain que l’homme doit vivre… »

            « Si tu es le Fils de Dieu » : le diable croit deviner, mais il ne sait pas. C’est pourquoi il dit : « si tu es… », … prouve-le ! Cette appellation est fréquente dans l’Ancien Testament. Elle désigne tout membre du peuple de Dieu. Ce n’est que bien plus tard, après la Résurrection, qu’elle en viendra à désigner la personne divine de Jésus. En l’utilisant ici, le diable ne fait que rappeler que Jésus, enfant du peuple juif, affronte à nouveau les tentations que le peuple a subi au désert. Ce sont donc les tentations de tout homme.

            Tentation contre “l’espérance” : on se cabre devant l’épreuve, la souffrance… on demande à Dieu de supprimer tout ce qui nous fait souffrir… Devant le “mal” on est tenté d’accuser Dieu ou bien de lui demander de résoudre miraculeusement nos problèmes…  Tentation “économique » aussi : la société de consommation, avec son matérialisme pratique, risque de ne s’intéresser qu’aux “nourritures terrestres” en oubliant les “nourritures spirituelles”.

            En conclusion, retenons que la Parole de Dieu reste prioritaire pour celui qui veut être disciple de Jésus-Christ. Dieu prend soin de celui qui cherche d’abord sa justice et son royaume (Mt 6,33). Mais il nous laisse la responsabilité de nos choix et de nos engagements ; il ne veut surtout pas être un magicien agissant à notre place.

Publié dans MATTHIEU

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