MATTHIEU, POUR QUI ÉCRIS-TU ?

Publié le par GITANS EN EGLISE

MATTHIEU, POUR QUI ÉCRIS-TU ?

 

            Plus qu’un témoignage personnel, La BONNE NOUVELLE selon Saint MATTHIEU est le « reflet » d’un MILIEU DE VIE, l’écho d’une PRÉDICATION adaptée à un auditoire bien déterminé, sa COMMUNAUTÉ.

 

1. Une communauté chrétienne d’origine juive :

Ø  Imprégné des traditions juives, attentif à replacer récits et événements dans un cadre juif, Matthieu est vraisemblablement juif de naissance, d’éducation et de culture. Par l’évocation concrète du milieu où vécut Jésus, cette BONNE NOUVELLE est “palestinienne” sans aucun doute !  - Quelques exemples :

 

·         Usage rapportés avec prodigalité, sans explication : 12,5 ; 19,3.

·         expressions sémitiques non traduites : 5,22 ; 6,24 ; 26,7 ; etc. (comparer avec Marc : 3,17 ; 5,41 ; 14,12). Sauf en 3 circonstances : Mt 1,23 ; 27,33 ; 27,46.

·         Vocabulaire typiquement sémitique : “ville sainte” (4,5) : comparer avec Lc 4,9 ; “la chair et le sang” (=l’homme) : 16,17 ;  “lier et délier” (=condamner ou absoudre) : 16,19 et 18,18 ; “la Loi et les Prophètes” : 22,40 ; etc.

·         Préoccupations théologiques : 5,17-19 (passage “propre” à Mt) ; 7,12 ; les impies sont sans loi : 7,23 ; 13,41 ; 24,20 ; le rejet du peuple juif : 8,11-12.

·         Allusion à des problèmes typiquement juifs : aumône-prière-jeûne : 6,1-18 ; sacrifices : 5,23-24 ; divorce : 19,1-10 ; etc.

 

Ø  L’Ancien Testament est cité, plus ou moins explicitement, plus de 130 fois : 43 citations claires ; 11 textes où se trouve la formule typiquement “matthéenne” : « Tout cela arrivera pour que s’accomplisse ce que le Seigneur avait dit par le Prophète... » [c’est-à-dire : “se réalise”] : 1,22-23  (voir aussi : 2,15.17.23 ; 4,14 ; 8,17 ; 13,35 ; 21,4 ; etc.) ; 37 sont précédées d’une “introduction” qui les mettent en relief (intention apologétique) : en plus des précédentes références =  12,17-21 ; 27,9-10 ; etc.

 

Ø  Ces citations de l’A.T. ont ceci de caractéristique, qu’elles sont souvent “propres à Mt”, qu’elles constituent une réflexion personnelle de l’évangéliste ; qu’elles témoignent d’ingéniosité dans l’application ; que l’incorporation au texte s’avère plus ou moins habile ; et que “l’esprit araméen” s’en dégage. -  Ainsi Mt combine parfois avec un art subtil (tout à fait conforme à la tradition des rabbins !) plusieurs citations de l’A.T. : par ex. lors de Zacharie 9,9 et Isaïe 62,11.

 

Ø  Matthieu veut ainsi faire “toucher du doigt” à des hommes pétris d’Écriture :

                        =  que Jésus est le nouveau Moïse donnant au nouveau Peuple la Loi nouvelle.

                        =  que Jésus, le Messie annoncé par les Prophètes, vient accomplir les Écritures.

                        =  que ces citations de l’A.T. expriment la “vérité” du mystère de Jésus.

 

2.  Une communauté  “en conflit”  avec le Judaïsme officiel.

 

à      C’est en Mt que Jésus polémique le plus durement avec les Pharisiens. Il combat vigoureusement leur conception légaliste du salut faisant de l’observation minutieuse et tatillonne de la Loi un droit au salut. Le “murmure” des ouvriers de la vigne (20,1-16), c’est précisément le leur !  Jésus leur oppose son message : le salut est gratuit : il s’agit d’accueillir la miséricorde infinie de Dieu et d’agir comme lui vis-à-vis de nos frères (18,23-35).

 

à      En Mt les Juifs semblent appartenir à un autre monde dans lequel les “chrétiens” ne se reconnaissent plus. Très souvent Mt parle de “leurs” synagogues (4,23 ; 9,35 ; 10,17 ; 12,9 ; 13,54 ; 23,34).

 

           À l’époque de la rédaction définitive de l’Évangile, le judaïsme d’après 70 connaissait, à Jamnia (lieu de repli des chrétiens de Jérusalem), un renouveau assez agressif contre le Christianisme exclu des synagogues. Alors, toutes ces invectives contre les Pharisiens sont-elles vraiment celles que Jésus lançait contre eux dans les années 30... ou bien celles du Seigneur vivant dans la Communauté des années 80... ?  -  Succès du christianisme, raidissement du judaïsme : le côtoiement quotidien ne peut manquer d’être explosif ! 

 

3.  Une communauté ouverte aux païens.

 

à      Cet “universalisme” suppose une conversion radicale de la Communauté acceptant progressivement cette “Bonne Nouvelle” du salut offert également aux païens.

 

à      Si l’activité de Jésus se situe en Palestine (si ce n’est une pointe vers Tyr et Sidon : 15,24), son enseignement sur l’appel des païens au salut, est sans équivoque ; quelques textes clairs : 8,10-12 ; 10,18 ; 15,28 ; 21,43 ; 22,9 ; 24,14.

 

à      La Galilée apparaît comme le symbole du monde païen [« Galilée, toi le carrefour des païens » 4,15], terre de rencontre universelle. C’est là, précisément, et non pas à Jérusalem que le Christ ressuscité se manifeste ; et c’est de là qu’il envoie ses disciples dans le monde entier (28,16-20).

 

à      Mt avait d’ailleurs, dès son prologue, prit soin de montrer Jésus adoré par les Mages, des païens venu des “autres nations”.

 

à      Mt sera attentif à traduire tout de même certains mots : signe qu’il s’adresse aussi à des croyants non juifs.

 

4.  Dernières précisions :

 

Ø Toutes ces indications font penser que l’Évangile selon Saint MATTHIEU

Ø a pu naître dans des communautés de Syrie-Palestine  (à Antioche de Syrie ?)

Ø entre les années  80-90.

 

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